Comprendre la fiscalité des cryptomonnaies en France
Les cryptomonnaies, telles que le Bitcoin, l’Ethereum ou encore le Ripple, suscitent depuis plusieurs années un véritable engouement. Que vous soyez investisseur chevronné ou simple curieux ayant effectué quelques achats sur une plateforme d’échange, vous vous êtes peut-être déjà demandé si vous deviez déclarer vos actifs numériques aux impôts. En 2024, la législation française reste particulièrement attentive à cette catégorie d’actifs, et il est essentiel de bien comprendre ses obligations fiscales pour éviter des sanctions financières. Voici ce qu’il faut savoir.
Les cryptomonnaies : des actifs numériques soumis à la loi
En droit fiscal français, les cryptomonnaies sont considérées comme des actifs numériques. Cela implique qu’elles ne sont pas reconnues comme des devises ayant cours légal, mais rentrent tout de même dans le champ d’application de la fiscalité applicable aux particuliers dès lors qu’elles font l’objet de cession, c’est-à-dire d’un échange contre des euros ou un autre bien ou service.
La loi française impose donc une imposition sur les plus-values réalisées lors de la vente de cryptomonnaies si les gains sont perçus à titre occasionnel. Ce régime fiscal, mis en place depuis la loi de finances pour 2019, a pour objectif de clarifier les modalités de déclaration et de taxation de ces actifs jusque-là peu encadrés.
Les obligations déclaratives en 2024
Pour l’année 2024, les détenteurs de cryptomonnaies doivent respecter plusieurs obligations déclaratives auprès de l’administration fiscale. Il ne s’agit donc pas seulement de déclarer des gains : posséder un ou plusieurs comptes sur des plateformes étrangères constitue en soi une nécessité de déclaration.
Voici ce que vous devez déclarer :
- Les comptes d’actifs numériques détenus à l’étranger : Tout compte ouvert sur une plateforme de cryptomonnaie située hors de France (Binance, Coinbase, Kraken, etc.) doit impérativement être déclaré, même si aucun gain n’a été réalisé. Cette déclaration se fait via le formulaire n°3916-bis en même temps que votre déclaration de revenus annuelle.
- Les plus-values de cession : Si vous avez vendu des cryptomonnaies au cours de l’année 2023 (l’année fiscale déclarée en 2024), vous devez indiquer les plus-values, même si elles résultent de mouvements ponctuels. Le formulaire à utiliser est le n°2086.
Qui est concerné par la déclaration ?
Tout résident fiscal français est concerné par ces obligations, qu’il soit détenteur actif ou passif. Ne pas trader activement ne vous exempte pas de ces obligations. Posséder un compte ouvert sur une plateforme étrangère, même si vous n’avez effectué aucun virement depuis ce compte, implique une déclaration. En effet, l’administration fiscale française considère la détention d’un compte à l’étranger comme potentiellement génératrice de revenus non déclarés.
Notez également que si vous utilisez des plateformes françaises enregistrées auprès de l’AMF (Autorité des Marchés Financiers), comme Coinhouse ou Paymium, la déclaration du compte n’est pas nécessaire : ces acteurs sont déjà en contact avec les autorités fiscales françaises.
Quel régime d’imposition pour les gains ?
En 2024, les particuliers sont soumis au régime de la “flat tax” pour les gains issus de la vente de cryptomonnaies. Cela signifie que les plus-values nettes réalisées à titre occasionnel sont imposées à hauteur de 30 %, réparties comme suit :
- 12,8 % d’impôt sur le revenu
- 17,2 % de prélèvements sociaux
Ce régime ne s’applique que si l’activité est occasionnelle. Si vous effectuez du trading intensif ou si vous exercez une activité professionnelle liée aux cryptomonnaies (vente de services rémunérée en cryptos, minage, etc.), l’imposition se fait selon le régime des Bénéfices Non Commerciaux (BNC) ou des Bénéfices Industriels et Commerciaux (BIC), ce qui peut impliquer un taux plus élevé.
Comment calculer ses plus-values ?
Le calcul des plus-values n’est pas aussi intuitif qu’il y paraît. Il repose sur la méthode du “prix moyen pondéré” (PMP) appliqué à l’ensemble du portefeuille crypto. Cela implique que chaque vente est comparée au prix moyen d’acquisition des cryptomonnaies détenues sur l’ensemble du portefeuille.
Par exemple, si vous avez acheté 1 BTC à 30 000 € et 1 BTC à 20 000 €, le prix moyen de votre portefeuille est de 25 000 € par unité. Si vous vendez 1 BTC à 35 000 €, votre plus-value taxable sera donc de 10 000 €.
Des outils existent pour simplifier ces calculs, comme Koinly, Waltio ou Coqonut, qui permettent de compiler les transactions issues de plusieurs plateformes et d’automatiser le calcul des plus-values à déclarer.
Le risque en cas de non-déclaration
Ne pas déclarer ses comptes ou ses gains liés aux cryptomonnaies peut avoir de lourdes conséquences. L’administration fiscale peut appliquer des pénalités qui peuvent aller jusqu’à :
- 1 500 € d’amende par compte non déclaré (10 000 € si le compte est domicilié dans un État non coopératif)
- Une majoration de 80 % sur les montants éludés, en cas de volonté manifeste de fraude
- Des intérêts de retard de 0,20 % par mois
L’administration dispose également d’outils de plus en plus efficaces pour traquer les mouvements de cryptomonnaies, notamment grâce à l’obligation faite aux plateformes d’échange de transmettre certaines informations sur leurs utilisateurs. Il devient donc de plus en plus difficile d’échapper à l’impôt sans prendre des risques importants.
Les nouveautés fiscales en 2024
En 2024, plusieurs évolutions viennent renforcer le cadre réglementaire. Parmi celles-ci :
- La mise en place d’une directive européenne (DAC8) venant renforcer l’échange d’informations fiscales relatives aux cryptomonnaies entre les pays membres de l’UE.
- La demande croissante de transparence des plateformes d’échange qui, pour pouvoir exercer dans l’Union européenne, doivent désormais s’enregistrer auprès des autorités financières locales.
- L’arrivée possible d’un prélèvement à la source sur les plus-values sous certaines conditions, bien que cette mesure reste encore au stade de réflexion.
Ces évolutions montrent que les cryptomonnaies ne sont plus un “far west” fiscal. Les autorités mettent en place des mécanismes similaires à ceux de la finance traditionnelle afin de mieux encadrer l’activité et lutter contre le blanchiment d’argent ainsi que la fraude fiscale.
Bonnes pratiques pour rester en règle
Pour éviter toute mauvaise surprise avec l’administration fiscale, voici quelques bonnes pratiques à adopter :
- Tenez un registre précis : Historique des achats, ventes, transferts entre wallets, dates, montants… Chaque mouvement doit être consigné.
- Utilisez des logiciels de gestion fiscale : Ces outils automatisent les calculs et simplifient la déclaration.
- Anticipez votre déclaration annuelle : Ne laissez pas les démarches pour le dernier moment. Le formulaire 2086, en particulier, peut être chronophage.
- Informez-vous régulièrement : La conformité passe par une bonne veille réglementaire. Les règles fiscales peuvent évoluer rapidement.
En 2024, déclarer ses cryptomonnaies aux impôts n’est plus une option, c’est une obligation légale. Que vous soyez un investisseur averti ou un simple détenteur occasionnel, il est nécessaire d’agir avec prudence et transparence. Loin d’être une entrave, cette rigueur permet aussi de sécuriser vos investissements sur le long terme, en évitant toute épée de Damoclès fiscale.